Je sais depuis ma tendre enfance que le fait d’être bilingue est un privilège. La famille de ma mère est francophone et celle de mon père, anglophone. Je peux vous dire que les visites en famille étaient intéressantes, surtout avec les cousins qui ne connaissaient pas le français et nous qui baragouinions l’anglais. Je crois que c’est à ce moment qu’est né mon rêve d’être traductrice. Pas parce que j’aime les mots (comme j’entends souvent d’autres dire lorsqu’on leur demande : « pourquoi la traduction? »), mais bien parce que j’aime la communication. Je trouve essentiel que le message soit compris des deux côtés de la barrière invisible, mais très présente, des langues.
Alors maintenant à 51 ans, je suis en deuxième année d’études en traduction et j’adore! Même quand mes notes ne sont pas aussi bonnes qu’elles devraient l’être, même lorsque je dois étudier jusqu’à minuit les soirs de semaine, J’ADORE!!! Le retour sur les « bancs d’école » n’est pas facile, mais grâce à mes jeunes amis, beaucoup plus facile que j’anticipais.
La jeunesse à l’Université de Moncton provient de toute part de la francophonie. Il y a beaucoup de jeunes Africains, Européens, Québécois (qui échappent à une année d’études) et Néo-Brunswickois, entre autres. La cacophonie entre deux cours est très intéressante avec toutes les variations de la langue française.
Pour vous mettre en contexte, j’ai passé mon enfance dans l’Outaouais et j’ai déménagé à l’âge de 12 ans à Montréal. Presque 20 ans plus tard, j’ai décidé de m’établir au Nouveau-Brunswick. Donc, mon héritage linguistique provient de deux régions distinctes : l’Outaouais et Montréal. Rien ne m’avait préparée au langage acadien, et j’avoue être « tombée en amour » avec l’Acadie, avec les gens d’ici et leur langue, qui est très riche et colorée. Je suis ravie par l’accent acadien qui diffère d’une région à une autre. Sa modulation chantante et les mots archaïques font en sorte que les conversations peuvent être cocasses par moments.
Voici quelques exemples de mots qui m’ont surprise les premières fois que je les ai entendus :
Mot acadien | Équivalent en français international | Exemple de phrase |
---|---|---|
berlandeux | indécis | Il est berlandeux. |
couler | glisser | La glace m’a fait couler le pied. |
espérer | attendre | Espère-moi. |
galance | balançoire | On va sur la galance. |
hardes | vêtements | On lave nos hardes. |
mitan | milieu | On se rejoint au mitan du chemin. |
Pour plus de mots, voir le Glossaire acadien de Pascal Poirier (accès libre sur Internet).
Il ne faut surtout pas avoir peur de demander des clarifications sur ce qu’on entend parce que ça peut mener à des histoires très comiques. Je suis très heureuse de vivre en milieu acadien, j’en profite pour apprendre une variante de la langue française qui a réussi à survivre à travers les siècles (ça fait plus de 400 ans que les Acadiens sont ici).
Bon, pour revenir à nos moutons, je suis de souche québécoise, mais Acadienne de cœur, et mon amour pour la langue ne fait que grandir. J’étudie pour être traductrice, mais en fait, je ne suis pas très puriste, ce qui va me créer des problèmes (j’en suis certaine!). Pour l’instant, j’en suis à l’étape de l’apprentissage. En fait, j’aimerais être interprète, car j’ai eu plusieurs fois l’opportunité de faire de l’interprétation de l’espagnol à l’anglais et de l’espagnol au français ainsi que de l’anglais au français et du français à l’anglais. J’étais toujours très consciente que le message, le contenu, était ce qui était important et non pas les mots nécessairement. Je me devais d’être le plus près du sens possible et de devenir un pont entre deux mondes qui ne pouvaient pas se comprendre.
Quel métier merveilleux, celui de traduire d’une langue à l’autre à l’oral! Je n’aime pas dire « interpréter », car le sens risque d’être mal compris : on n’interprète pas les mots, on livre le message dans une autre langue. Enfin, on appelle ça de l’interprétation, alors qui suis-je pour changer le titre d’un si beau métier? Souhaitez-moi bonne chance dans mes études et dites-moi si vous avez des histoires cocasses à me raconter sur vos expériences lexicales avec une variante de votre langue.