Le journal Le Franco est l’unique journal de langue française en Alberta. Il publie une rubrique intitulée « Le coin du grammairien » qui se propose de démêler les mystères de la langue française, à travers des exemples ludiques et accessibles, pour le grand plaisir de ses lecteurs et pour tous les niveaux.
Nous publions ici le deuxième condensé des textes de cette rubrique. Celui-ci traite des homophones, ces mots qui se prononcent de la même façon mais qui s’écrivent différemment.
Un bouquet des plus épineux
Arriverez-vous à deviner le sens des mots au moyen de ces exemples?
Air, aire, ère
L’air froid du matin flottait sur l’aire de repos aux abords de Fort McMurray, cette ville emblématique de l’ère pétrolière.
Balade, ballade
Le dimanche, j’aime faire des balades dans le parc d’Elk Island avec, dans mes oreilles, le doux son des ballades de Chopin.
Différends, différents
Un différend au sujet de l’oléoduc Kinder Morgan oppose les différents responsables politiques de l’Alberta et de la Colombie-Britannique.
Gène, gêne
Des chercheurs sans gêne ont volé l’ADN de patients pour en extraire leurs gènes.
Repaire, repère
Cet arbre est un repère pour nous indiquer que nous nous approchons du repaire de l’ours.
Au temps pour moi ou autant pour moi?
Je pensais que vous habitiez à Calgary, au temps pour moi!
Eh oui, l’expression s’écrit ainsi : « au temps pour moi »! Elle tire son origine du lexique militaire. On disait « au temps! », pendant un exercice militaire, pour ordonner aux soldats de synchroniser leurs mouvements (et 1, 2, 3…). Puis, par extension, on a utilisé l’expression hors de son usage premier dans un sens plus figuré. Elle signifie de nos jours que l’on admet son erreur, et que l’on reprend donc les choses depuis le début!
Ne pas la confondre avec autant pour moi qui exprime l’idée d’une quantité égale :
Deux amis sont au café Bicyclette à Edmonton :
Jean. — Je voudrais un verre de vin s’il vous plaît.
Pascal. — Autant pour moi!
On active ses neurones : é ou er?
Casse-tête pour de nombreuses personnes, la ressemblance phonique du « é » et du « er » peut pourtant être évitée avec une astuce toute simple : remplacer le mot par un verbe du 3e groupe!
Exemple avec le verbe « attendre » :
Si l’on peut dire « attendu », c’est un participe passé en « é ». Si l’on peut dire « attendre », alors ce sera l’infinitif en « er ».
Il a passé des heures au téléphone (« il a attendu des heures » et non « il a attendre des heures »)
On peut remplacer le verbe par n’importe quel autre verbe du 3e groupe :
- L’élève n’a plus écouté le professeur (« il n’a plus mordu le professeur » et non « il n’a plus mordre le professeur »)
- Ils sont arrivés en retard (« ils sont partis en retard » et non « ils sont partir en retard »)
- Elle a écouté son frère chanter (« elle a écouté son frère répondre » et non « elle a écouté son frère répondu »)
- Nous avons oublié d’étudier (« nous avons oublié de prendre » et non « nous avons oublié de pris »)
- J’aimerais aller au cinéma (« j’aimerais dormir au cinéma » et non « j’aimerais dormi au cinéma »)
Trois problèmes faciles à éviter
« a » ou « à »?
C’est l’anniversaire de sa fille samedi! Elle a beaucoup de choses à préparer cette semaine.
Si vous pouvez remplacer le mot par « avait », c’est qu’il s’agit du verbe « avoir ». Il faut donc écrire « a » sans accent. Sinon, c’est la préposition « à » avec l’accent grave.
« ça » ou « sa »?
- La dinde est trop petite pour tous les convives, ça ne va pas.
- Ça? C’est sa spécialité!
« Ça » peut être remplacé par « cela », car c’est un pronom démonstratif. En revanche, « sa » est un adjectif possessif, qu’on peut donc remplacer par « ma, ta, notre, votre… ».
« censé » ou « sensé »?
- Avec tous ces bons conseils, je suis censé ne plus faire de fautes!
- Les grammairiens sont des gens sensés.
Sensé = qui a du sens ou qui fait preuve de bon sens. Censé = supposé. Si vous pouvez remplacer le mot par « supposé », alors c’est « censé » avec un « c »! C’est sensé, non?
Nous espérons que ces chroniques du Franco vous ont appris quelque chose. Si c’est le cas, dites-le-nous dans les commentaires! Si vous avez aimé ce billet, vous aimerez sans doute aussi le premier, qui portait sur des pièges de la conjugaison.