Être « entraîneur » au féminin

Publié le 29 octobre 2018

Pas toujours facile d’être langagière. Je me casse parfois la tête avec des détails, et ce, même dans ma vie personnelle. Comme la fois où j’ai dû choisir le titre à faire broder sur la manche de mon manteau de hockey.

J’ai jonglé avec trois mots pendant des heures : entraîneur, entraîneuse, entraîneure… Étant à peu près la seule femme à occuper ce poste dans l’association, je ne pouvais pas m’inspirer du titre de mes consœurs. Alors, que choisir?

C’est ainsi que ma matière grise s’est mise en branle.

Entraîneur

Laisser « entraîneur » au masculin? Hum, j’hésite… On prône la féminisation des titres de professions au Canada.

Entraîneuse

Opter pour le féminin officiel d’« entraîneur »? Euh… la seule idée de dire le mot « entraîneuse » me fait rougir, probablement parce que mes parents sont Français. En effet, ce mot a aussi le sens suivant, peu connu au Canada : « femme employée dans les bars ou les discothèques pour pousser les clients à consommer ».

J’ai un blocage psychologique. C’est peut-être trop près de « traîneuse » : une personne qui laisse traîner ses choses partout.

Si on s’attarde à tous les sens d’un mot, on n’est pas sorti de l’auberge, me direz-vous. La solution devrait pourtant être simple puisque « entraîneuse de hockey » est le titre officiel donné dans la Classification nationale des professions.

N’empêche qu’au début des années 2000, l’Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec a adopté « arpenteure-géomètre » plutôt que la forme officielle « arpenteuse-géomètre » pour une raison semblable. Le mot « arpenteuse » désigne à la fois le métier et… une sorte de chenille.

Je ne sais pas pour vous, mais j’ai l’impression que les noms de métiers en –euse ont souvent une connotation négative.

Entraîneure

Quant à « entraîneure », ça sonne bien, n’est-ce pas? Petit hic, cette forme n’est pas admise.

En effet, la majorité des noms de métiers en –eur ont une forme féminine officielle en –euse. Seulement une quinzaine de noms ont une forme en –eure uniquement (comme professeure, ingénieure et docteure). Quelques autres noms en –eure (comme entrepreneure, défenseure et réviseure) ont aussi une forme en –euse, qui serait à privilégier.

Mais dites-moi, employez-vous l’« entrepreneuse », la « défenseuse », la « réviseuse »?

Décision de l’arbitre

Bon, je vous demande maintenant de vous mettre dans ma peau. C’est le temps d’enfiler vos patins, vous êtes l’arbitre!

Coup de sifflet.

Alors, pour quel titre auriez-vous opté à ma place?

Rendez votre décision en répondant au sondage sur le compte Twitter du Portail linguistique (le sondage est maintenant terminé).

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Fanny Vittecoq

Fanny Vittecoq

Fanny Vittecoq a été rédactrice des comptes rendus des comités de la Chambre des communes, terminologue, conseillère linguistique, traductrice-conseil, chroniqueuse pour L’Actualité langagière, et est maintenant langagière-analyste. Bien qu’elle ait une prédilection pour les problèmes épineux et complexes liés à la langue, elle affectionne tout autant la rédaction de jeux linguistiques. Jouer avec les mots a d’ailleurs toujours été son dada : adolescente, elle a été médaillée au Championnat québécois de Scrabble duplicate!

 

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Commentaires

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Soumis par johanne Lévesque le 30 octobre 2018 à 15 h 36

Je veux pas m'inscrire sur Twitter pour voter, mais moi je choisirais entraîneure.

Soumis par Fanny Vittecoq le 2 novembre 2018 à 9 h 11

Merci de me faire parvenir votre choix. C’est un choix légitime, puisque d’autres féminins en « –eure » existent!

Soumis par Annette Sturgeon le 30 octobre 2018 à 23 h 11

Si entrepreneur, défenseur, réviseur, auteur ne prennent qu'un « e » au féminin pourquoi est-ce qu'entraîneur ne pourrait pas suivre la même loi?
Pour moi aussi ça sonne mieux à l'oreille de dire : « Je suis une entraîneure » que de dire : « Je suis une entraîneuse »!
Il faut travailler à faire changer certaines lois comme celle-ci au niveau de notre chère langue française!

Soumis par Fanny Vittecoq le 2 novembre 2018 à 9 h 11

J’aimerais bien aussi que le féminin « entraîneure » soit attesté! Il faut continuer de suivre l’évolution de ce mot. Il le sera peut-être un jour!

Soumis par Christine le 7 novembre 2018 à 10 h 13

J'ai le même problème; je dois décider ce qui sera inscrit sur mon chandail. De plus, je travaille dans une école alors je dois faire attention, mais je n'ai pas du tout envie d'inscrire entraineuse!!!

Soumis par Mélanie Guay le 13 novembre 2018 à 12 h 56

Sujet intéressant pour ceux qui, comme moi, aiment le sport. Sur mes vêtements, j'inscris le mot coach ou assistante-coach.

Soumis par aucomint le 27 janvier 2019 à 8 h 25

À l'instar du mot auteure, je suis partisan d'utiliser le mot entraîneure. D'une part on évite effectivement l'amalgame avec le temps peu glorieux d'entraîneurs. D'autre part on met en valeur une caractéristique fondamentale du français qui est d'être une langue « vivante ».

Soumis par Etienne le 6 octobre 2019 à 14 h 43

Merci pour ce billet! Il faudrait qu'entraineure soit accepté! (Comme ingénieure et docteure...)

Soumis par Michel Sacco le 30 janvier 2020 à 16 h 34

Je cherchais le nom féminin d'entraîneur et je vois que je ne suis pas seul à être ennuyé. Entraîneuse, moi qui suis aussi Français, vraiment, ça ne passe pas. Je choisis volontiers entraîneure.

Soumis par Fanny Vittecoq le 3 février 2020 à 18 h 19

Merci pour votre commentaire, cher membre de ma grande famille française, Monsieur Sacco! J'avoue ici que c'est l'option que je choisirais aujourd'hui. Mais ce n'est pas ce que j'ai fait broder sur ma manche il y a quelques années!

Soumis par Emmanuelle Bernard le 28 juillet 2020 à 11 h 38

Entraîneure avec un E, définitivement, qu'ils se dépoussièrent un peu ces académistes.

Soumis par Fanny Vittecoq le 28 juillet 2020 à 15 h 48

Oui, la langue évolue. La féminisation des titres de fonctions en -eure est toutefois une tendance canadienne et non française (académiciens de l'Académie française). La féminisation des titres de fonctions se fait traditionnellement en -euse (comme entraîneuse) et en -trice (autrice). Le Petit Robert donne, par exemple, auteur, autrice avec la remarque suivante : « La forme féminine est autrice (latin auctrix), on la rencontre aux sens 2°, 3° et 4°; on trouve aussi une auteure sur le modèle du français du Canada ». Merci de m'avoir écrit!

Soumis par Camille Laberve le 7 juin 2021 à 15 h 03

Je trouve que Entraineur(e) sonne beaucoup mieux! J’ai décidé de l’inscrire ainsi sur mes affiches malgré que ce soit incorrect … en espérant que le mot entraîneuse soit modifié pour suivre les autres mots tel Docteure etc…

Soumis par Fanny Vittecoq le 10 juin 2021 à 15 h 01

Bonjour! Vous soulignez que la graphie "entraîneure" est incorrecte... J'aimerais apporter quelques précisions qui pourraient vous rassurer. Quand j'ai publié ce billet, j'avais lancé un sondage Twitter et Facebook pour connaître l'avis de mes lecteurs et lectrices. La question était la suivante : « Quel nom devrait-on utiliser pour désigner une femme qui entraîne une équipe sportive? » Eh bien, le féminin « entraîneure » avait remporté la palme à
63 % dans Twitter (résultat similaire dans Facebook). C'est donc dire que vous n'êtes pas la seule ayant cette préférence! De plus, depuis la publication de mon billet, je suis tombée sur un article du Wiktionnaire où l’on donne cette précision pour « entraîneure » : « (XXe siècle) Dérivé de entraineur avec le suffixe -eure, comme alternative au mot entraineuse ayant parfois une connotation sexuelle. » Il ne s'agit peut-être pas d'une source solide, mais je trouve que l'article a le mérite de faire état de l'évolution de la langue. Les exemples de l’article ont été puisés dans des sources de renommée, autant canadiennes que françaises :
- Le Britannique Andy Murray a gagné son premier match avec Amélie Mauresmo comme entraîneure, […] La Presse.ca, 11 juin 2014)
- Cette nomination d’une femme à la tête d’une équipe professionnelle de football intervient trois mois après que la Roumaine Elena Groposila est devenue entraîneure de l’équipe de handball masculine de Dijon. […] Libération.fr, 7 mai 2014)
J'espère que ces renseignements dissiperont un peu vos craintes à utiliser le féminin en -eure. Cette graphie n'est peut-être pas "officielle", mais je n'irais pas jusqu'à la condamner. C'est mon opinion personnelle! Merci de votre commentaire! :)

Soumis par Claire Mercier le 15 avril 2022 à 16 h 30

Entraineure à 200%
Il est vraiment temps que les femmes prennent bien sa place même dans les définitions.
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