Combien de fois vous est-il arrivé d’avoir encore entre les mains la fameuse lettre « w » alors que vous tentiez de terminer votre partie de Scrabble? L’éternel « wagon » ou « waterpolo » en tête, vous aurez malheureusement perdu 10 points faute d’avoir pu placer votre « w ». Mais que cache cette mystérieuse lettre?
Le « w » aurait été admis très tardivement dans la langue française. Selon certaines sources, son entrée officielle remonterait à 1948 dans le Petit Larousse, et à 1964 dans Le Grand Robert. Toutefois, Denis Diderot et Jean Le Rond d’Alembert, visionnaires du Siècle des Lumières, avaient prévu quelques entrées débutant par la lettre « w » dans leur encyclopédie. Il s’agissait pour la plupart de noms propres ou de noms étrangers, qui ont été qualifiés par la suite d’« emprunts ». D’ailleurs, l’entrée en matière de cet ouvrage parle d’elle-même :
« W […], cette lettre n’est pas proprement de l’alphabet françois. C’est la nécessité de conformer notre écriture à celle des étrangers, qui en a donné l’usage. Si l’on eût consulté l’oreille [et] la prononciation, on l’auroit rendu par ou. »
(Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, 1re édition, 1751, tome 17, p. 583)
Des années plus tard, alors qu’il présentait l’un de ses abécédaires, Albert Jacquard, généticien et philosophe moderne, a mentionné qu’on n’en avait que faire de la lettre « w » dans la langue française.
« Double v » en français et double "u" en anglais, la lettre « w » est considérée comme une semi-consonne ou une semi-voyelle. Son caractère inusité semble inévitablement nous ramener à une langue autre que le français.
La prononciation [v] de la lettre « w » est notamment un héritage de l’Allemagne. Donc, si un mot débute par un « w » et est d’origine allemande, on prononcera le son [v], comme dans « walkyrie » [valkiRi]. D’autres mots étrangers suivent cette règle, dont « wagon » [vagɔ̃], qui serait issu du néerlandais. Si un mot est d’origine anglaise ou qu’il a transité par l’anglais, on prononcera le son [ou], comme dans « western » [wɛstɛʀn] ou dans « whip » [wip]. Toutefois, certaines populations francophones de la planète prononcent toujours le « w » comme le son [ou]. Par exemple, les Belges diront [wagɔ̃] et non [vagɔ̃].
Le « w » en rafales
Le « w » ne fait pas partie de l’alphabet traditionnel italien ni roumain; si on le trouve dans certains mots, c’est qu’il s’agit d’emprunts à une autre langue.
Le won, illustré par un « w » doublement barré (₩), est l’unité monétaire de la Corée du Nord et de la Corée du Sud.
La fraction massique « w » est une unité utilisée notamment en agroalimentaire pour représenter la composition d’un mélange. On l’emploie dans des formules mathématiques.
Le watt, représenté par le symbole « W », est l’unité de mesure de la puissance électrique, mécanique ou thermique produite par une installation.
Le « W » est également le symbole de l’élément chimique « tungstène » (Wolfram en allemand, d’où la lettre « w ») qui lui est, par définition, un métal d’une très grande dureté.
Quand on s’intéresse au sujet, on constate à quel point la lettre « w » se cache un peu partout.
En somme
Le « w » est venu bonifier le vocabulaire français grâce aux emprunts qu’il a permis. Il s’est avéré utile dans le domaine scientifique. Il a également permis de traduire des mots d’origine autochtone comme wapiti (wapitik) et wigwam (wikiwam), issus de l’algonquin.
Si votre partie de Scrabble est toujours en cours et que l’on vous permet de flirter avec les dictionnaires pour apposer la fameuse lettre potentiellement payante, sachez que Le Petit Robert et le Petit Larousse proposent un inventaire d’environ 90 mots débutant par la lettre « w ». Sinon, élargissez vos horizons en cherchant des mots contenant le « w », comme « kiwi » et « crawl », plutôt que de vous limiter à ceux qui commencent par cette fameuse lettre.
Bonne partie!