- Se prononce ba-ra-trie. S’écrit avec un seul r (bara-), contrairement à son correspondant anglais ("barratry"), et un seul t, en dépit de l’attestation des deux graphies baraterie et baratterie qu’enregistrent certains dictionnaires.
- Ne pas confondre baraterie et batterie, le second mot étant un archaïsme au sens d’échange de coups, de rixe, de querelle de gens qui se battent, et le crime appelé "battery" n’existe pas comme tel au Canada. Voir assaut.
- Le mot est attesté depuis le 14e siècle. Baraterie (ou sa variante barterie) avait alors le sens de tromperie. Jusqu’à la fin du 17e siècle, les dérivés du mot étaient en usage dans la langue de la procédure ou du palais. Étymologiquement, un groupe de mots se rattachait à l’italien "barrataria" fraude (fraude 1, fraude 2, fraude 3) et un autre groupe, à l’italien "baretta" (chicane) : barat (tromperie, ruse, fourberie), barate (confusion, agitation, embarras, ruse), baratement (fraude, tromperie), barateor et le féminin barateresse (trompeur, fraudeur, fripon, chicaneur), barateus (trompeur, frauduleux), barateusement et barateressement (frauduleusement, par fraude, en trompant) et barater (tromper, frauder, chicaner, décevoir). Ces mots correspondaient en anglais, selon leur étymologie, soit au crime de "baratry" (acte fraduleux commis par le capitaine d’un navire), soit à l’infraction de "barretry" (abus des contestations et des chicanes). Ainsi, l’étymologie du mot dégage deux sens : le premier, celui de fraude, le deuxième, celui de chicane.
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Premier sens : fraude, tromperie. Notre langage du droit a conservé le mot baraterie dans ce premier sens. Il désigne généralement, en droit maritime, la fraude que commet le capitaine, le maître ou patron d’un navire, au préjudice des armateurs ou des assureurs. On le voit, l’emploi du mot se rattache surtout au domaine des assurances maritimes.
Le droit français et le droit anglais distinguent le sens à donner au mot. En droit français, la baraterie comprend toutes les fautes du capitaine, de quelque nature qu’elles soient, et s’étend à la négligence ou à l’impéritie, tandis que, en droit anglais, "barratry" a un sens plus étroit et ne comprend que les seuls actes intentionnellement frauduleux ou criminels.
Cela dit, le mot est archaïsant en France. Le Code de commerce en son article 353 l’employait encore récemment : « L’assureur n’est point tenu des prévarications et fautes du capitaine et de l’équipage, connues sous le nom de baraterie de patron, s’il n’y a convention contraire. ». Aujourd’hui, on dit plutôt la faute du capitaine.
Au Canada, le mot est conservé : le délaisser serait perdre une nuance utile. Les prévarications sont des actes de détérioration volontaire du navire ou de sa cargaison par le capitaine fraudeur aux dépens des assureurs, de l’armateur ou des chargeurs (baraterie du patron, baraterie du capitaine : "barratry of the master"). Mais la baraterie s’étend également aux actes commis par les membres de l’équipage, lorsqu’ils sont les préposés du capitaine, ou conjointement par le capitaine et son équipage, le plus souvent en vue de toucher la prime d’assurance (baraterie de l’équipage). « La baraterie est tout acte de prévarication volontaire du maître ou de l’équipage qui cause une perte aux propriétaires ou aux affréteurs. »
Les actes de baraterie ne se limitent pas au simple fait de causer volontairement le naufrage du navire. Ils se rapportent le plus souvent au vol du navire ou à la contrebande quand elle est le fait du capitaine, ou à d’autres infractions (abordage fautif, échouement volontaire sans motif plausible, incendie par négligence, arrimage défectueux, chargement excessif, opérations fautives d’embarquement et de débarquement, déviation inutile, vente sans nécessité de marchandises par le capitaine en cours de voyage, violations de blocus en temps de guerre pour livrer le bateau à l’ennemi), et ainsi de suite.
Pour qu’il y ait baraterie, deux éléments doivent être présents : (1) une intention malveillante (peu importe les mobiles de l’acte) ou une faute volontaire du capitaine ou de ses préposés et (2) l’acte doit être commis contre les intérêts de l’armateur. Auteur d’un acte de baraterie. Être coupable de baraterie. Perte du fait de la baraterie. « Le marin s’est rendu coupable de baraterie. »
Dans les lois canadiennes sur l’assurance maritime, la baraterie est assimilée aux périls de mer : « Une déviation ou un retard dans la poursuite du voyage indiqué dans la police est excusable (…) lorsqu’ils sont dus à la baraterie du capitaine ou de l’équipage, si la baraterie est l’une des fortunes couvertes. ».
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Deuxième sens : agitation, chicane. En common law, l’infraction de "barratry" consistait en une incitation fréquente aux litiges, à un abus du droit d’ester (ester 1, ester 2) en justice ou de plaider. Le "barrator" excitait aux procès, poussait à la chicane en troublant la paix, répandait de fausses rumeurs et des calomnies de façon à faire croître la discorde et les troubles en incitant les voisins à se quereller entre eux.
Cette notion de fréquence de l’acte explique que l’on parlait de "common barratry", pratique consistant à appuyer indûment une partie à intenter une ou des actions en justice dans le dessein de partager les fruits du jugement.
- En droit écossais, est appelée "barratry" l’infraction consistant à corrompre un juge. On parle, en droit français, de vénalité, du juge vénal. En droit canadien, l’infraction qui consiste à corrompre un juge tombe dans la catégorie de la corruption de fonctionnaires judiciaires et du trafic d’influence. Il convient de distinguer, la baraterie de la concussion et de la subornation.
- En droit canonique, la baraterie se rapproche de la simonie des ecclésiastiques qui vont à l’étranger acheter des bénéfices pour être nommés à un office ecclésiastique (provision simoniaque d’un office) et qui administrent un sacrement avec l’intention délibérée d’acheter ou de vendre le sacrement pour un prix temporel, quels qu’en soient le contenu, la valeur ou le montant (réalisation d’un sacrement avec un accord simoniaque).
- La documentation fait apparaître un emploi par extension et au figuré du mot au sens de vol éhonté, notamment dans le droit de la propriété industrielle : la baraterie de la contrefaçon.
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