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Il est facile de confondre les mots saisie et saisine : dans l’un de ses sens, la saisine s’entend du fait de saisir des biens. Or, la saisie en matière successorale n’a rien à voir avec la confiscation, la saisine qu’a le syndic des biens du failli, la mise sous séquestre ou la saisie-arrêt en tant que prise de possession d’un bien par un créancier en vue d’obtenir paiement de sa créance ou d’en faire disposer judiciairement, ce qu’on appelle la saisie mobilière ou immobilière (et non la [saisine] mobilière ou immobilière dans le droit des biens). Cette appréhension de biens est la mise en possession de l’hérédité, du patrimoine du défunt par les héritiers, appelée saisine successorale ou saisine héréditaire.
Ainsi, en droit successoral, on entend par saisine l’acte par lequel les héritiers légitimes (héritiers naturels, conjoint survivant) saisissent de plein droit les biens du défunt, appréhendent la succession, c’est-à-dire se mettent en possession, sans formalité préalable, du seul effet de la loi, des biens du de cujus.
En se prévalant des clauses testamentaires, l’héritier testamentaire est lui aussi saisi de plein droit par la mort du testateur. En outre, l’exécuteur testamentaire peut se saisir, comme eux, des biens dont le testateur lui a conférés la saisine. Sa saisine (sa possession) lui est accordée pour qu’il puisse veiller à l’exécution 1 du testament. Saisine de fait, saisine de droit. Saisine légale. Saisine du légataire, des successeurs, de l’exécuteur testamentaire. Dévolution de la saisine. Saisine dévolue au légataire, à l’exécuteur testamentaire. Nature, source, effets, portée, conséquence, priorité, préséance de la saisine. Avoir la saisine de biens, d’actions, de droits, en être saisi. « Le légataire est saisi du droit à la chose léguée dans l’état où elle se trouve. » « L’exécuteur testamentaire est saisi comme dépositaire légal des biens meubles de la succession. » Durée de la saisine. « La saisine dure du temps où l’exécuteur a cessé d’être empêché de se mettre en possession. » Modifier, restreindre, étendre la saisine. Coexistence, juxtaposition des saisines. Exercice de la saisine. « Le liquidateur exerce, à compter de l’ouverture de la succession et pendant le temps nécessaire à la liquidation, la saisine des héritiers et des légataires particuliers. » Fin de la saisine. « Une fois l’exécution du testament terminée, la saisine de l’exécuteur testamentaire prend fin. » C’est là le sens de l’ancien adage venu de la pratique coutumière Le mort saisit le vif (par son hoir le plus proche) : dès la mort du de cujus, ses biens passent à ses héritiers légitimes sans aucune formalité de justice. Ceux-ci ont la saisine de la succession par le seul fait du décès. « La saisine que produit la maxime « le mort saisit le vif » est le droit de possession du défunt, qui continue dans la personne de l’héritier. »
Selon la Cour suprême du Canada, citant l’arrêt Brière avec approbation, la saisine ne doit pas s’entendre de l’opération de transmission de la propriété du défunt (puisque cette transmission s’effectue de plein droit en vertu de la loi et du testament) ni de la transmission de la possession (puisque la possession constitue une situation de fait). Elle est plutôt « l’autorisation légale de se comporter « de plano » en possession de l’hérédité, ou, mieux encore, l’habilitation légale à exercer les droits et actions du défunt sans avoir besoin d’accomplir aucune formalité préalable. » Elle doit s’entendre, comme le dit Mayrand, du « droit de prétendre à la situation possessoire du défunt. » « La saisine des légataires décrit leur vocation à exercer la possession des biens dont ils sont par ailleurs propriétaires. »
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Dans le droit des biens en régime de common law, la saisine ("seisin" ou, plus rarement, "seizin") est définie comme le fait pour un propriétaire franc ("freeholder"), c’est-à-dire le propriétaire d’une tenure libre et perpétuelle, d’avoir la possession et le titre d’un domaine franc ("freehold estate"). Elle se dit aussi soit de l’acte d’être ainsi mis en possession, soit de l’acte de prendre possession, soit encore du bien objet de la saisine. La saisine s’entend par opposition aussi bien à la possession du domaine à bail ("leasehold estate") et autres biens personnels qu’à leur occupation ("occupation"), forme de possession effective ("actual possession") plutôt que de possession de droit ("legal possession" ou "possession in law").
La saisine peut être effective ("seisin indeed" ou "actual seisin"), simple ("simple seisin"), légale ("seisin in law"), en common law ("legal seisin") ou en equity ("equitable seisin").
Le covenant de saisine ("covenant of seisin") atteste que le concédant ("grantor") est légalement saisi ("legally seized") et qu’il a le droit de transporter par concession ("convey by grant") les biens et toutes choses en dépendant au moment de la passation de l’acte de transport ("execution of the conveyance"). Concéder la saisine. Transmettre la saisine au bénéficiaire. Mutation de saisine. Être débiteur de la saisine pour autrui.
La délivrance de la possession du domaine s’opère en présence des témoins à la remise du titre du bien-fonds dans le cadre solennel du fieffement par livrée de saisine ("feoffment with livery of seisin"), méthode traditionnelle, en common law, de concession ou d’aliénation de biens.
La personne qui est titulaire du titre de propriété sur des biens personnels emportant droit de possession est dite saisie ou en être saisie, en avoir la saisine, en détenir la saisine ou être investie de leur saisine. Investir le bénéficiaire de la saisine, investiture de la saisine. Saisine d’uses. Saisine suspendue, tenue en suspens.
La vacance de saisine constitue une interruption dans la possession d’une franche tenure ("freehold"). Selon une règle féodale, cette possession devait être continue, d’où la règle interdisant la vacance de saisine ("rule against abeyance of seisin"). Détenir, conserver la saisine.
En matière de location, le domaine à bail ("leasehold") comporte une durée limitée ou fixe. Sa caractéristique principale est que le locateur ("landlord"), tout en conservant la saisine, transporte la possession du bien à un locataire ("tenant") pour une période de temps déterminée.
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Dans le droit de la procédure, la saisine est une institution juridique qui permet de saisir une juridiction, c’est-à-dire de déférer à une autorité une question qui fait l’objet d’un différend, d’une contestation, de lui renvoyer une affaire.
Dans ce mode d’introduction de l’instance, on parle de saisine parce que, dès lors que l’avis introductif d’instance ou la requête est déposé au greffe, la juridiction est saisie, autrement dit, il y a de sa part appréhension de l’objet du litige sur lequel elle est tenue de statuer. Saisine du tribunal de première instance, de la Cour d’appel, de la Cour suprême. Formalité procédurale, la saisine permet à une juridiction de connaître d’un litige. Saisine d’un tribunal, du juge, d’une commission, d’un conseil d’arbitrage, d’un comité de discipline. Saisine du jury.
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Au couple positif saisir – saisine on oppose le couple négatif dessaisir – dessaisissement (et non [dessaisine]). Tous les justiciables jouissent de par leur qualité de la capacité de saisir une juridiction, autrement dit, de la prérogative, du pouvoir, du droit de saisine. Une juridiction peut même en saisir une autre pour obtenir une consultation juridique, cas de la saisine juridictionnelle. Ce moyen permet ainsi aux juridictions de l’ordre judiciaire de demander l’avis d’une cour supérieure sur une question d’interprétation du droit pertinent avant de se prononcer dans une affaire dont elles sont saisies. « Avant de statuer sur une demande soulevant une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, les juridictions de l’ordre judiciaire peuvent, par une décision non susceptible de recours, solliciter l’avis de la Cour de cassation, qui se prononce dans le délai de trois mois de la saisine. »
La saisine s’exerce dans le respect de règles procédurales strictes. Elle ne peut s’opérer irrégulièrement.
- Le verbe saisir s’emploie à la forme active pour marquer l’acte de saisir, à la forme passive pour marquer le fait d’être saisi et à la forme pronominale pour marquer l’acte de saisine. Saisir la justice. Être saisi d’un litige (et non d’une [instance]). Le juge, le tribunal est saisi par un acte de saisine qui l’oblige à statuer sous peine de déni de justice. La saisine se conçoit ainsi comme l’exercice effectif de la compétence juridictionnelle. « Il est loisible aux parties de saisir la Cour de la question des dépens. » « En conséquence, je refuse de me saisir des questions soulevées dans la mesure où elles n’ont pas déjà été abordées dans les présents motifs. » « La Cour est saisie de l’appel de cette décision. » « En conséquence, le juge saisi a bien formulé en droit le critère applicable. »
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