Mes grands-parents et le gujarati
L’un des plus beaux cadeaux que ma grand-mère (nanima) m’a offerts est de m’avoir appris sa langue. Quand j’étais jeune, mon grand-père (nanabapa) et elle marchaient avec nous, ma sœur et moi, jusqu’à l’école primaire, et nous en ramenaient à la fin de la journée. Pendant que mon nanabapa nous racontait des blagues, ma nanima, qui a enseigné toute sa vie, profitait de nos promenades pour nous aider, ma sœur et moi, à perfectionner notre gujarati. Le gujarati est une langue indo-aryenne originaire de l’État du Gujarat, en Inde. Il s’agit de la langue officielle du Gujarat, mais elle est aussi très répandue en Asie du Sud et ailleurs. Heureusement, ma nanima est une excellente enseignante, si bien qu’en peu de temps, ma sœur et moi étions celles qui racontaient des blagues à nos grands-parents… en gujarati! J’étais loin de me douter que nous aurions bientôt l’occasion d’offrir un cadeau similaire à ma grand-mère.
Leurs petites-filles et l’anglais
Dans le cadre de l’examen qu’ils devaient passer pour obtenir la citoyenneté canadienne, mes grands-parents devaient se soumettre à une entrevue en anglais. L’anglais de mon nanabapa était assez bon, mais ma nanima préférait s’exprimer dans sa langue maternelle, le gujarati. Inquiètes devant la possibilité très réelle qu’elle échoue à son entrevue, ma sœur et moi avons pris l’initiative de devenir ses professeures privées et de lui enseigner l’anglais. Même si elle était hésitante au début, ma nanima était une élève modèle dotée d’une mémoire exceptionnelle. Au bout de quelques semaines, elle pouvait non seulement nommer toutes les provinces et tous les territoires du Canada, mais aussi les énumérer d’ouest en est. Cela est assez impressionnant si l’on tient compte du fait que l’anglais est sa cinquième langue!
Malheureusement, cette tâche lui serait impossible aujourd’hui. Il y a près de trois ans, ma grand-mère a reçu un diagnostic de démence. Au début, sa perte de mémoire évoluait lentement, mais récemment, elle s’est aggravée à un rythme beaucoup plus rapide. Après avoir passé quelques mois dans un centre de réadaptation, ma nanima est revenue à la maison et vit maintenant avec mes parents et moi. Depuis, ma mère et moi aidons ma nanima à se souvenir de l’alphabet et des chiffres en gujarati et en anglais. Nous chantons aussi des chansons avec elle, nous lui racontons des histoires et nous ajoutons un peu d’humour à ses journées, tout comme elle et mon nanabapa le faisaient pour ma sœur et moi. Toutefois, ma nanima a aussi trouvé un nouveau professeur : mon neveu de quatre ans!
Leur arrière-petit-fils, et un échange intergénérationnel enrichissant
Ce qui a commencé comme un jeu amusant qui consistait à « faire apprendre ses couleurs à nanima » est vite devenu une séance d’enseignement hebdomadaire remplie d’espièglerie et de magie. L’attention et la détermination de mon neveu ont permis à ma nanima de progresser et d’améliorer sa prononciation – pas si mal pour une femme de 94 ans! Cependant, mon neveu ne lui montre pas seulement les couleurs. Son « programme d’enseignement » comprend aussi les principaux moyens de transport et les très importants noms de ses personnages de dessins animés préférés, d’où les espiègleries qui s’ensuivent inévitablement. Fait intéressant, nanima n’est pas ici la seule élève : mon neveu apprend aussi des choses d’elle.
Mon neveu a compris rapidement que la façon la plus efficace d’enseigner à nanima était d’utiliser un mélange d’anglais et de gujarati. Le résultat? Un échange intergénérationnel qui motive mon neveu et ma nanima à poursuivre leur enseignement et leur apprentissage… même s’ils s’assoupissent parfois au milieu d’une leçon.
Les langues sont un véritable cadeau, et cela me fait chaud au cœur de voir mon neveu développer sa passion pour l’enseignement et l’apprentissage des langues. Quelles sont les langues que vous avez le plus envie d’apprendre ou d’enseigner dans les mois à venir?