Le bilinguisme est un atout majeur, voire essentiel, pour progresser dans sa carrière au sein de la fonction publique. Certains d’entre vous ont pu suivre une formation. Vous y mettez beaucoup d’efforts, puis vous retournez à votre routine professionnelle. Quelques mois s’écoulent, les occasions d’utiliser votre langue seconde au quotidien sont moins nombreuses et, tranquillement, les notions apprises sont oubliées. J’ai souvent vu ce scénario se répéter... Comment rentabiliser les efforts déployés à apprendre une langue seconde pour la maintenir active et florissante? C’est une question que je me suis posée tout au long de ma carrière, et à laquelle je vous propose quelques pistes de solution.
Jeunes apprenants
Je connais bien les réalités linguistiques majoritaire et minoritaire des francophones du Canada, puisque j’y ai fait de nombreux allers-retours au fil des déménagements et des promotions obtenues. Je suis né à Shawinigan, Québec, et j’ai passé ma petite enfance en français à Montréal, puis ma famille a déménagé à Toronto. Je ne parlais pas encore anglais et être un francophone hors Québec en 1970, c’était très difficile, surtout dans la cour d’école. En classe, j’excellais en mathématiques, ce qui a masqué pendant plusieurs semaines mon unilinguisme. Ce n’était évidemment pas une solution à long terme! Heureusement, j’ai trouvé le meilleur lieu pour permettre à un jeune homme comme moi d’apprendre : le terrain de sport. Ce n’est pas étonnant que tant de professionnels de l’apprentissage des langues recommandent aux apprenants de trouver une activité ou un loisir pour apprendre dans un milieu amusant.
Apprenants adultes
En revanche, apprendre une langue seconde à l’âge adulte est un défi tout autre, qu’on soit fonctionnaire ou non. J’ai travaillé de nombreuses années dans des communautés de langue officielle en situation minoritaire dans le domaine du droit et de la gestion, qui sont des milieux où l’anglais s’impose souvent dans les communications. Plus tard, lorsque j’ai occupé le rôle de champion des langues officielles, j’ai pu constater le même déséquilibre pour ce qui est des occasions de pratiquer une langue seconde. L’entourage des apprenants a un rôle à jouer dans le maintien des apprentissages de leurs collègues. J’ai constaté que les francophones parviennent plus facilement que les anglophones à pratiquer leur langue seconde dans la fonction publique, car souvent, les équipes choisissent de communiquer en anglais dès qu’un participant parle l’anglais. Mais travailler dans ce contexte ne permet pas aux anglophones de pratiquer l’écoute active et la prononciation en français si leur entourage ne leur en offre pas l’occasion. C’est notre devoir, en tant que francophones, de créer des environnements accueillants et positifs pour les apprenants du français comme deuxième langue.
Qui plus est, nous sommes tous encouragés à tenir des réunions réellement bilingues, comme décrites dans le guide Pratiques efficaces régissant la présidence des réunions bilingues et l’outil Réunions bilingues : passons à l’action! du Commissariat aux langues officielles. Je vous entends déjà me dire que les réunions en sont rallongées et qu’il peut être redondant pour les personnes bilingues d’entendre répéter les instructions… Mais c’est justement ça, le défi à surmonter pour offrir aux employés une chance équitable de perfectionner leur langue seconde. Combien de fois ai-je vu les francophones s’exprimer en anglais aux réunions du comité de gestion! Et pourtant, on devrait voir – et entendre – les membres du plus haut niveau de notre organisation donner l’exemple.
Pour incorporer un aspect ludique à l’apprentissage, plusieurs organismes tiennent des activités de jeux et discussions dans la langue seconde, certains organisent des « mardis en anglais / jeudis en français » et d’autres mettent en place des systèmes de jumelage linguistique. Il y a bien des façons de valoriser l’apprentissage et le maintien du bilinguisme dans nos milieux de travail. Les apprenants ont aussi l’obligation de maintenir leur deuxième langue; pour ce faire, ils peuvent recourir aux moyens pratiques qu’offrent les médias traditionnels et numériques, comme écouter la radio, la télévision ou des baladodiffusions, regarder des films et des pièces de théâtre, lire des sites Web.
Nous devrions tous augmenter nos efforts pour aider nos collègues à conserver leur apprentissage. Les personnes habiles dans les deux langues ont le devoir de soutenir au quotidien les gens qui n’ont pas eu la chance d’apprendre les deux langues officielles dans leur enfance. Après tout, c’est en encourageant le bilinguisme réel et vivant au quotidien que nous pourrons solidifier les apprentissages et ainsi hausser le niveau de bilinguisme de nos équipes. L’effort passera peut-être inaperçu, mais il sera la fondation de grandes réussites.
Ce billet a été rédigé dans le cadre de l’activité de la plume d’or, qui vise à donner aux membres de la haute direction de la fonction publique fédérale l’occasion de s’exprimer sur un aspect des langues officielles qui leur tient à cœur ou de parler de leur expérience linguistique personnelle. Consultez la page La plume d’or : une activité du blogue Nos langues (s’ouvre dans un nouvel onglet) pour en apprendre davantage sur cette tradition annuelle et lire les billets écrits par d’autres détenteurs et détentrices de la plume d’or au fil des ans.