La beauté de la langue

Publié le 15 novembre 2021

J’adore les langues. La lecture et l’écriture sont d’ailleurs mes activités préférées. Dévorer un bon livre équivaut à avoir une discussion intime et agréable avec un ami. Écrire, par ailleurs, représente un dialogue entre l’être physique et l’esprit. Cependant, malgré mon amour de la langue, je n’ai réellement pris conscience de sa beauté que lorsque j’ai commencé à utiliser ma langue seconde, l’anglais, au travail et dans la vie quotidienne.

Tenir la langue pour acquise

La langue est comme l’air qui nous entoure : l’air est indispensable à la vie, y compris la vie humaine, et pourtant nous y portons rarement attention. Quand une personne s’exprime dans sa langue maternelle dans un cadre informel, comme à la maison ou entre amis, les mots s’enchaînent naturellement, presque d’eux-mêmes. Au quotidien, il est rare que nous employions la langue à une fin précise ou que nous réfléchissions à l’usage que nous en faisons. La même chose est vraie pour la respiration, à moins que les techniques de respiration ne soient au cœur de l’activité pratiquée. Comme la langue est un rouage essentiel de notre routine, nous avons rarement l’occasion de l’examiner avec objectivité. En conséquence, sa beauté nous file sous le nez.

Cette beauté s’apparente à une graine qui germe lorsqu’on s’en occupe avec soin et intérêt. Si l’anglais avait été ma langue maternelle, sa beauté ne me serait pas apparente. Ma pratique du droit en Chine et l’amour que je voue à la langue ont fait de moi une personne éloquente et une rédactrice chevronnée. Ceux et celles qui me connaissent jugeraient, comme moi, que ma connaissance du chinois est excellente. Avant ma venue au Canada, les mots n’ont pratiquement jamais posé problème, même lorsque je rédigeais des textes juridiques. La langue chinoise ne faisait pas partie de mes préoccupations, et ne constituait certainement pas un objet de curiosité ni d’attention particulière.

Devenir étudiante et enseignante

Une fois établie au Canada, mon objectif premier était d’améliorer mon anglais. J’ai donc saisi toutes les occasions de le pratiquer. J’ai choisi de travailler dans des domaines, comme l’interprétation, où la justesse de la langue est essentielle. J’ai entre autres enseigné le chinois à des écoliers. La plupart des élèves pouvaient à peine comprendre le chinois, même si nous utilisions des manuels dans cette langue. J’ai donc dû recourir à l’anglais pour enseigner ma langue maternelle.

Après quelques cours, je me suis rendu compte que ma connaissance du chinois n’était pas aussi bonne que je le pensais. J’ai dû revoir un nombre considérable de concepts de base. La langue chinoise comptant une multitude d’homonymes, mais seulement quatre tons, un caractère mal prononcé peut rapidement faire déraper une conversation. J’ai d’ailleurs réalisé que le ton que j’employais pour certains caractères était incorrect, un héritage de mon dialecte. L’ordre des traits dans les caractères chinois est aussi fort utile aux élèves et aux étudiants. Il les aide à comprendre la structure des sinogrammes, le point de départ pour la maîtrise de cet élément fondamental du chinois écrit. Or, j’avais oublié cet ordre depuis longtemps. Ainsi, j’ai commencé à prêter attention à certains éléments fondamentaux de la langue chinoise que j’ignorais depuis belle lurette. C’est lorsque j’ai commencé à l’enseigner dans l’espoir d’améliorer ma maîtrise de l’anglais que ma langue maternelle s’est mise à rayonner. En fin de compte, c’est ma connaissance des deux langues qui s’est améliorée. Chaque progrès dans mon apprentissage de l’anglais me révèle de nouvelles merveilles, qu’elles se rapportent ou non à la langue.

Plus j’apprends, plus je découvre ce qu’il y a à apprendre. L’infini potentiel de perfectionnement de la langue m’a ouvert les yeux et l’esprit et me permet de voir le monde d’une toute nouvelle manière. La langue a déjà été pour moi un simple moyen de communication, mais je sais aujourd’hui qu’elle est bien plus que cela. Nos pensées et nos paroles définissent qui nous sommes. La beauté de la langue réside dans sa puissance transformatrice.

Avertissement

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En savoir plus sur Zhang Hui

Zhang Hui

Zhang Hui est consultante réglementée en immigration canadienne, auteure et membre associée de la Society of Translators and Interpreters of British Columbia (Société des traducteurs et interprètes de la Colombie-Britannique). Elle a également exercé les professions d’avocate et d’arbitre en Chine. Amatrice de lecture et amoureuse de la langue, elle a publié des écrits dans différents genres littéraires et croit fermement à la puissance des mots : nos pensées et nos paroles définissent qui nous sommes. Zhang Hui privilégie la forme chinoise de son nom, dans laquelle le nom de famille précède le prénom.
 

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Soumis par Daniel Martin le 22 novembre 2021 à 11 h 44

Bonjour, une petite question... En jasant avec mon fils qui vient d'adopter un beau petit minou, on a constaté que les noms des bébés animaux sont "toujours" masculins : un chaton, un chiot, un poussin. Et là, on a réalisé qu'il y avait des poulains et des pouliches... On s'y retrouve comment dans tout ça???
Merci. Daniel Martin
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