- Lato sensu, le mot doctrine s’entend de l’ensemble des opinions que professent des auteurs sur un sujet particulier du droit (la doctrine par opposition à la législation et à la jurisprudence) ou encore de l’ensemble des auteurs d’ouvrages et d’articles traitant soit de domaines, de questions ou de problèmes précis du droit, soit du droit en général, ou de tous ces travaux réunis, en ce dernier sens, la doctrine ou les auteurs par opposition au législateur et aux tribunaux.
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Stricto sensu, la doctrine désigne, notamment, une conception classique élaborée au sujet d’une question, d’un problème ou d’une situation juridiques : doctrine de l’abus de droit, doctrine de la responsabilité délictuelle, doctrine de l’atténuation du préjudice. La question se pose de savoir en quoi la doctrine envisagée dans ce sens se distingue de la théorie, surtout, mais aussi du principe et de la règle. La distinction se réduit-elle à une différence de degré de généralité de l’objet, la doctrine étant la conception la plus générale, la théorie donnant lieu à l’énoncé du principe, lequel, dans sa conception la plus élémentaire, étant exprimé dans une règle?
Il faut dire que la question présente une réelle pertinence dès lors que la confusion paraît dominer sur cette distinction et se manifester par un manque d’uniformité terminologique, les uns appelant doctrine ce que d’autres, pour une même notion du droit, nomment théorie, principe ou règle.
De plus, en contexte de traduction, comment rendre le mot anglais doctrine? Correspond-il toujours à doctrine ou peut-il désigner une théorie ou un principe? La theory anglaise est-elle toujours, quant à elle, une théorie ou arrive-t-il qu’elle soit considérée comme une doctrine? Enfin, la notion de doctrine a-t-elle un sens particulier en common law qui serait différent du sens que lui donne le droit civil?
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Autre sens strict, la doctrine désigne un ensemble de principes établis. Constitué d’une série de principes, mais aussi d’un corps de règles, cet ensemble de conceptions forme, dans une branche du droit, un système cohérent.
Les sources d’une doctrine sont le plus souvent jurisprudentielles et doctrinales, rarement législatives. Dans le système juridique auquel elle appartient, la doctrine est universellement reconnue. Ainsi, les tribunaux manifestent moins d’hésitation devant l’autorité d’une doctrine que devant la force d’une théorie et se montrent moins hésitants à prendre appui sur elle dans la motivation des jugements qu’à souscrire sans réserve aux divers aspects d’une théorie pour fonder leurs motifs. Dans l’enseignement du droit, les auteurs et les professeurs exposent une doctrine conformément à sa réception, tandis que la théorie est présentée de façon plus nuancée, étant ponctuée de réserves et de distinctions.
La doctrine touche davantage à un ou à des principes fondamentaux, et même à la philosophie du droit dans une matière, la théorie vise des principes qui sont établis et qu’énoncent très succinctement, parfois même dans une seule phrase frappée en maxime, des règles de droit qui régissent ou gouvernent un problème particulier.
Vue comme un énoncé systématique de principes, de règles, de conceptions et de normes se rapportant à une situation particulière, à un type de cas ou à un domaine, une doctrine organise l’ordre juridique en fonction d’un régime logiquement construit (on parle d’ordonnancement juridique), ce qui permet au raisonnement juridique de s’articuler librement autour du régime pertinent et de ses composantes logiques.
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Toutefois, en common law, le mot anglais doctrine strictement entendu désigne essentiellement un principe défendu par certains auteurs, et donc une thèse, mais dont le bien-fondé ne fait pas nécessairement l’objet d’un accord général. « Dans le droit des biens réels, il n’y a pas de propriétaire absolu, si ce n’est la Couronne en ce qui concerne le domaine public. Pour ce qui a trait au domaine privé, certains auteurs affirment que la propriété reste dévolue à la Couronne, même après une concession, mais tous les juristes n’approuvent pas cette thèse. » (= this doctrine)
Le mot doctrine peut désigner aussi bien une théorie qu’un principe, mais jamais une règle. La théorie de l’alter ego, encore appelée théorie de l’identification (alter ego doctrine), pose qu’une personne peut en représenter une autre et lui être indispensable au point que ce qu’elle accomplit est considéré l’être par l’autre. La théorie des mains propres (clean hands doctrine) est, en réalité, fondée sur le principe d’equity qui énonce que quiconque veut l’équité doit avoir les mains propres, c’est-à-dire qu’il doit avoir une conscience tranquille. Selon cette théorie, le demandeur à l’action ne peut s’attendre à ce que justice lui soit rendue, s’il a lui-même quelque chose à se reprocher (s’il a les mains sales), quand il se présente devant le tribunal, concernant l’affaire qu’il porte en justice.
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La notion de doctrine se confond avec celle de théorie lorsqu’il est fait allusion à une idée, à une conception, à une tendance soutenue par un petit nombre de juristes et non accueillie de facto par une jurisprudence constante.
Par exemple, en matière de responsabilité civile, on qualifie de doctrine de la « peine privée » (qui a donné naissance dans les régimes de common law à l’institution des dommages-intérêts punitifs ou exemplaires) l’idée, soutenue par certains, de reconnaître à la condamnation prononcée contre le responsable le caractère d’une pénalité civile, qui ne différerait de la peine pécuniaire que par son attribution à une personne privée.
Cette opinion défendue par des juristes, laquelle peut être admise ou non, s’appelle aussi théorie de la « peine privée ».
Les mots doctrine et théorie sont ainsi interchangeables lorsqu’ils évoquent un simple point de vue, une conception exposée par des juristes, que des auteurs soutiennent, que d’autres rejettent, idée qui peut même être reprise dans d’autres perspectives. En ce sens, la doctrine ou la théorie met en branle ou anime ce qu’on appelle un mouvement doctrinal, dont l’incidence sur le droit positif peut d’ailleurs être très inégale selon les pays et les systèmes juridiques : elle peut être accueillie en common law, mais rejetée par les régimes civilistes.
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Il en est de même du principe et de la règle : dans le droit des obligations, on dit tout aussi bien la règle que le principe de l’intangibilité des ouvrages publics pour désigner un principe, fondé sur l’adage Ouvrage public ne se détruit pas, qu’ont dégagé à l’origine des tribunaux administratifs et qu’ont fini par appliquer généralement les juridictions judiciaires.
Il en va tout autrement lorsque la théorie est qualifiée de générale : elle désigne alors un ensemble de principes et de règles, construction vaste et diversifiée, assimilable à un système organisé, qui s’applique à une branche particulière du droit : ainsi en est-il de la théorie générale des obligations, en droit civil, ou de la théorie générale des contrats en common law.
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Ce que des auteurs appellent la doctrine ex turpi causa est, en réalité, sur le plan de l’expression, la forme elliptique d’une règle énoncée par la maxime Ex turpi causa non oritur actio : la créance née d’une cause immorale ou illégale ne peut être réclamée en justice. Des tempéraments ayant été apportés par les tribunaux, elle ne peut être conçue comme une [doctrine], mais comme un principe qui, prenant forme à l’aide des mots introductifs Ex turpi, parfois Ex turpi causa, sert de moyen de défense : la défense ex turpi.
Autre exemple : la théorie civiliste de la restitution des prestations s’inspire d’un principe qu’énonce l’adage Nul ne peut invoquer sa propre turpitude. Cette théorie est mise en œuvre dans son principe par une série de règles instituées en vue d’organiser en un tout cohérent ce qui devient un régime, celui de la restitution des prestations ou de la remise en état des parties concernées. Le législateur ayant apporté des tempéraments au principe pour éviter que son application par le jeu des règles énoncées dans les dispositions (dispositions 1, dispositions 2) édictées ne devienne source d’injustice, l’action subséquente des tribunaux (refus de la restitution des prestations, modification de l’étendue et des modalités de la restitution) a pour effet de transformer en doctrine ce qui, dans le droit antérieur, était une théorie.
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Voici comment il est possible d’illustrer le passage d’une règle à une doctrine en empruntant la voie du principe et de la théorie.
Soit tout d’abord une matière : l’immunité de la personne morale. Cette matière peut être abordée sous l’angle d’une règle : cette règle sera édictée par un article de loi. C’est ainsi qu’elle devient la règle de l’immunité. Elle établit qu’on ne peut invoquer l’immunité à l’encontre d’une personne de bonne foi dans certaines circonstances. Une fois énoncée, elle devient, au regard des cas qui relèvent d’elle, une théorie, la théorie de l’immunité, laquelle prend assise sur un double fondement – un fait : la personne morale jouit, en droit, d’une personnalité distincte de celle de ses membres – et un principe : la personne morale qui agit dans son intérêt propre ne peut lier ses membres. Cette théorie soulève une exception au principe de l’irresponsabilité des membres de la personne morale.
Soit maintenant une évolution de la théorie : suivant une jurisprudence constante, la théorie de l’immunité, telle qu’elle vient d’être posée, n’autorise nullement la personne morale à dissimuler la gestion de ses affaires internes sous le couvert de sa personnalité juridique. Quand l’article de loi édicte ce tempérament à la règle, il codifie du même coup la doctrine qui a été développée autour de la théorie de l’immunité : la personnalité juridique d’une personne morale ne peut servir à masquer des actes frauduleux, abusifs ou contraires à l’ordre public et, en ces cas, il est pleinement justifié judiciairement de soulever le voile de la personnalité juridique distincte.
Un principe (par exemple le principe de justice naturelle, encore appelé principe de justice fondamentale) entraîne la création de règles pour assurer sa mise en œuvre. Autrement dit, un principe sans règles d’application reste théorique et sans grande utilité. Ainsi, ce principe, qui comporte des effets déterminants sur les droits et les libertés de la personne, s’il régit un domaine particulier de l’activité judiciaire, inspirera l’établissement de règles particulières : elles ne s’appliqueront en l’occurrence qu’aux tribunaux administratifs dont la compétence est judiciaire ou quasi judiciaire. Leurs décisions devront prendre appui sur deux règles de justice naturelle : la règle Audi alteram partem (selon laquelle le justiciable a le droit d’être entendu) et la règle Nemo judex in causa sua debet esse (les juges ou les arbitres ne peuvent, sous peine de dessaisissement, se trouver en situation de conflit d’intérêts). Ces deux règles ne peuvent se concevoir autrement que comme ce qu’elles sont, des règles (et non des [principes], des [théories]), encore moins des [doctrines], puisque leur double fonction se limite à assurer le respect d’un principe et à régir la bonne marche d’une instance tout en veillant à l’administration équitable de la justice.
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Il convient d’ajouter que dans l’usage on qualifiera ces règles de maximes (si le point de vue adopté par le locuteur vise la forme de l’énoncé du nom de la règle : maxime Audi alteram partem) ou de principes (si le point de vue s’élève et considère que l’intitulé de la règle évoque le principe selon lequel le respect de l’équité procédurale est de rigueur).
Autres exemples : un principe, celui de l’indépendance judiciaire, nécessite la création de règles pour assurer sa mise en œuvre; ces règles porteront sur l’autonomie du pouvoir judiciaire au regard de deux composantes : l’autonomie individuelle des juges et leur indépendance à l’égard de l’organe exécutif du gouvernement. Il en est de même de tous les principes qui gouvernent un système de droit : principe de la suprématie du Parlement, principe de la primauté du droit, principe du précédent. Des règles sous-tendent l’élaboration de ces principes, cet ensemble formant un tout cohérent qui permet au droit d’évoluer.
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Les principes juridiques reconnus donnent lieu à des théories qui trouvent application dans des règles. Par exemple, la common law (au sens large) est un système de droit qui se compose de deux régimes juridiques, la common law (au sens strict) et l’equity. Ces régimes sont gouvernés par des principes qui se concrétisent dans des théories, desquelles, pour leur application dans les différents domaines de ce système, découlent des règles distinctes, les règles de common law et les règles d’equity.
Dans le droit des biens, la théorie domaniale (doctrine of estates) a ses règles particulières qui dérivent du principe fondamental de la propriété concurrente. Cette théorie comprend une opération juridique (un propriétaire foncier lègue son bien-fonds de façon concurrente à vie à une première personne et, résiduellement, à une deuxième personne), un effet juridique (au décès du testateur, les deux légataires deviennent propriétaires concurrents du bien-fonds, le domaine du premier faisant l’objet d’une jouissance immédiate, celui du second, d’une jouissance différée) et un état de droit (les deux domaines issus du legs sont concurrents). Elle a ses règles jurisprudentielles particulières qui découlent du principe fondamental de la propriété concurrente.
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Les théories ont leur source dans la jurisprudence. Les tribunaux élaborent des théories, qui deviennent reconnues, consacrées, classiques : théorie de l’abus de (du) droit, théorie de la stipulation pour autrui, théorie de l’enrichissement sans cause.
En interprétant les principes édictés par le législateur, ils édifient des ensembles de règles qui forment des régimes : la responsabilité du fait des choses inanimées, la responsabilité du fait d’autrui; c’est ainsi que la jurisprudence donne au système juridique des règles prétoriennes qui sont de droit positif. Mais seul le législateur peut édicter des règles de droit; ce sont des règles d’origine législative. Aux tribunaux alors, à défaut de créer des règles, d’en proposer, d’innover, d’inventer; ce sont des règles jurisprudentielles. Raisonnant par analogie ou par déduction, ils trouvent des solutions en énonçant des propositions générales, en invoquant des théories qui s’appliquent au cas d’espèce. Producteurs de droit, c’est en ce sens qu’ils font œuvre créatrice.
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Le principe est le plus souvent l’expression d’un idéal : justice égalitaire, justice pour tous, égalité devant la loi, égalité d’accès à la loi, courtoisie internationale, primauté du droit, indépendance judiciaire. En common law, selon le principe de l’application régulière de la loi (due process of law), rien ni personne ne se trouve au-dessus des lois. Principe de la primauté du droit ou de la loi, encore appelé principe de la souveraineté ou de la suprématie du droit ou principe de légalité (rule of law).
Il se distingue de la règle (dont l’objet est de régir, par opposition au principe, qui explique) en ce qu’il constitue un énoncé général du droit applicable à un large ensemble de circonstances indéterminées. On dit bien le principe de la justice naturelle, le principe de l’égalité des sexes (et non la [règle]). Il a une portée plus large que la règle : par exemple, la règle de la fiducie par déduction prévoit que, pour obtenir gain de cause, la partie lésée doit démontrer qu’elle a apporté une contribution en argent à l’acquisition du bien, tandis que le principe de l’enrichissement sans cause, dont la portée est plus étendue que la règle particulière, n’oblige pas à prouver l’apport de la contribution financière.
Linguistiquement, le principe s’exprime par un énoncé général et abstrait qui le caractérise; il se traduit par la construction suivante : principe + de + substantif (+, au besoin, un adjectif ou un déterminant). Principe de (la) connexité (contractuelle), de non-connexité (contractuelle), de la nécessité, de la prévisibilité, de la représentation, de la vulnérabilité de la victime, de l’angoisse du moment, de l’assurance, de l’exactitude, de l’exclusivité, de l’exécution en nature, de l’inattaquabilité, de la justiciabilité, de l’irresponsabilité, de temporisation, du prochain.
- Il arrive que le principe soit érigé en règle de droit. Par exemple, en droit pénal canadien, le principe de l’autorité de (la) chose jugée vise à empêcher que l’accusé soit jugé deux fois pour un même crime. Ce principe devient l’occasion d’énoncer une règle de droit, la règle relative à l’autorité de la chose jugée, laquelle tire son origine de deux maximes latines qui énoncent des règles : Nemo debet bis vexari pro una et eadem causa (= Nul ne doit être poursuivi deux fois pour une seule et même cause) et Nemo debet bis puniti pro uno delicto (= Nul ne doit être puni deux fois pour la même infraction). Ainsi, le principe de l’interdiction des condamnations multiples est érigé en une règle interdisant les déclarations de culpabilité multiples.
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Le principe peut se trouver à l’origine d’une théorie. Soit le principe selon lequel le titulaire d’un droit conféré par une loi n’est pas habilité à l’exercer dans certaines circonstances au motif qu’il ne peut l’exercer qu’à certaines fins. Des règles régissent, gouvernent les cas où les fins donnent lieu à contestation. L’ensemble que forment le principe, les règles et les décisions qui tranchent ces constatations constitue, dans le droit des délits, une théorie, celle de l’abus de droit ou du droit applicable au cas où une personne exerce un droit dans le but unique ou prédominant de causer un préjudice à autrui.
De même, la règle fondée sur un principe peut se trouver à la source d’une théorie qui constitue l’inférence naturelle d’une théorie stricte. Par exemple, la règle générale selon laquelle un contrat ne peut conférer des droits ou imposer des obligations aux tiers étrangers au contrat est fondée (en common law), sur le principe de la connexité contractuelle (privity of contract doctrine) ou (en droit français) de l’effet relatif des contrats qui veut que la loi du contrat ne s’applique qu’aux parties contractantes, d’où s’élabore dans les deux systèmes de droit toute une théorie de la connexité ou de l’effet relatif des contrats, le cas échéant.
- La règle (qui s’applique à une situation concrète) s’inspire d’un principe (d’ordre plus abstrait et général). Par exemple, dans le droit des biens en régime de common law, la règle d’interdiction des doubles possibilités (il y a nullité de bail quand celui-ci prend effet en étant fondé sur un imprévu qui dépend lui-même d’un autre imprévu) prend appui sur un principe (est nulle toute restriction subordonnée à plus d’une possibilité). De même, la règle d’interdiction de l’inaliénabilité (par exemple, sont interdites les donations directes assujetties à une restriction permanente visant leur aliénation) est tirée d’un principe fondamental du droit anglais (on ne peut rendre des biens inaliénables) et de la règle d’interdiction de perpétuités.
- Une décision judiciaire n’établit pas à elle seule un principe mais une règle : règle établie dans l’arrêt Hodge (et non [règle dans Hodge], ellipse créée par le jargon de la pratique). Il en est de même de toutes les règles qui ont leur source dans la jurisprudence : règle établie dans l’arrêt Phillips c. Eyre, règle énoncée dans l’arrêt Rylands c. Fletcher, règle formulée dans l’arrêt Saunders c. Vautier, règle prescrite dans l’arrêt Shelley.
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Enfin, la règle se distingue du principe en ce qu’elle constitue un énoncé particulier du droit sur une question particulière (le principe constituant, quant à lui, un énoncé général) qui vise des circonstances bien précises (le principe portant sur des circonstances indéterminées du fait de sa généralité).
Elle reçoit plusieurs applications selon les cas, entraînant avec elle des exceptions : par exemple, la règle de prépondérance de la preuve peut souffrir exception dans le cas de l’outrage au tribunal, pour lequel la preuve rapportée ne doit pas laisser place à un doute raisonnable.
Linguistiquement, elle s’exprime, pour sa caractérisation, de deux manières : règle + maxime latine (ou sa version francisée précédée le plus souvent par les locutions selon, suivant, d’après laquelle) et règle + de + substantif (+, au besoin, un adjectif ou un déterminant).
Dans la première manière, la maxime peut soit constituer la règle elle-même, soit sous-tendre une règle. Ainsi, comme on l’a vu, la maxime Audi alteram partem est constituée en règle fondamentale, en common law et en droit civil, qui établit le droit des parties à un litige d’être entendues. « Il ne peut être prononcé sur une demande en justice sans que la partie contre laquelle elle est formée n’ait été entendue ou dûment appelée. »
Par ailleurs, la maxime Accessorium sequitur principale sous-tend la règle selon laquelle, s’il est vrai que la cession de l’accessoire exclut celle du principal, il est tout aussi vrai que la cession du principal entraîne celle de l’accessoire.
Autres exemples : règle Accusare nemo se debet nisi coram deo (= Personne n’est obligé de s’accuser, si ce n’est en présence de Dieu), règle de droit judiciaire selon laquelle on ne peut témoigner contre soi-même; règle Actor sequitur forum rei (= Le demandeur suit le tribunal du défendeur), règle de compétence territoriale selon laquelle le demandeur doit intenter l’action devant le tribunal du domicile du défendeur; règle Actori incumbit probatio (= Le fardeau de la preuve incombe au demandeur), règle de droit judiciaire selon laquelle celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention, règle Sub judice (= sous le juge), règle de droit qui interdit la publication de tous commentaires susceptibles d’influencer la décision judiciaire, règle Alteri stipulari nemo potest (= Personne ne peut stipuler pour autrui), règle du droit des contrats d’après laquelle les contrats n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes et les tiers n’en retirent aucun avantage.
- Il arrive aussi qu’une locution ou une maxime latine soit érigée en règle que l’usage nommera tout aussi bien règle que principe selon le point de vue adopté et non par suite d’une confusion terminologique. Ainsi, les locutions caveat actor, caveat emptor, caveat venditor et caveat viator sont introduites dans le discours juridique par les termes règle ou principe (la règle caveat emptor, le principe caveat venditor) selon qu’il s’agit de considérer la règle établie dans un système juridique (en common law, la règle veut qu’il appartienne à l’acheteur de bien examiner l’objet du contrat et que le vendeur ne soit pas tenu des vices apparents dont l’acheteur a pu lui-même connaître l’existence) ou le principe qui gouverne, qui régit la situation ayant donné naissance à l’établissement de la règle (en common law, c’est à l’acheteur de s’assurer que le titre qui lui sera concédé par le vendeur est un titre valable et marchand).
Renseignements complémentaires
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