connaître (de)

Noter la présence de l’accent circonflexe sur la voyelle i dans toutes les conjugaisons de ce verbe, sauf le cas où elle n’est pas suivie de la consonne t. Connaître, connaîtrez, connais, connaissons. Cet accent tient lieu de la lettre s disparue dans l’évolution de la langue et la règle s’applique à tous les verbes qu’elle régit : apparaître, croître, paraître, disparaître, méconnaître et leurs dérivés.

  1. Le verbe connaître suivi de la préposition de ne s’emploie qu’en droit et dans une acception unique : on dit pour cette raison qu’il est d’appartenance juridique exclusive.

    À l’instar du verbe occuper suivi de la préposition pour, le sens juridique du mot connaître n’apparaît qu’au moment où on l’accompagne de la préposition de.

  2. Ainsi, transitif indirect, connaître de signifie avoir compétence, être compétent pour juger. On constate tout de suite que dire [être compétent pour connaître de], sans être un pléonasme vicieux, est tautologique en ce sens que la tournure est une répétition inutile de la même notion de compétence; elle est superfétatoire. Pourtant, on la trouve partout et sous les meilleures plumes; elle est devenue une formule figée tout à fait courante dans la langue des juristes. Dire tel tribunal peut connaître de telle affaire paraît alors relever d’un meilleur usage.
  3. Comme transitif direct, connaître perd son sens juridique et ne signifie plus que savoir, être conscient, être au courant. « Le Tribunal connaît bien cette règle de droit. » « La Cour connaît ses pouvoirs. » En ce sens, on ne peut employer le verbe connaître comme transitif indirect sans commettre une faute de sens. » « La Cour [connaît de] l’inactivité de l’Administration publique » (= est consciente, sait que, est au courant, ne méconnaît pas).
  4. Attention! Dans le syntagme connaître d’office, le verbe est transitif direct et, par conséquent, n’a pas le sens d’être compétent pour juger. Le mot office ne signifie pas, lui non plus, que le juge connaît un fait, une question, un principe, une théorie, un texte séance tenante, de par sa charge de juge, proprio motu, au cours du délibéré ou autrement, puisqu’il peut en décider de son propre chef, de sa propre initiative ou à la demande d’une partie. Il signifie qu’il n’y a pas lieu, selon lui, de le prouver. Il en prend connaissance judiciaire, au même titre que le ferait un jury, parce que le sujet lui-même n’a pas à faire l’objet de la production d’une preuve ou de la présentation de témoignages, notamment d’expert.

    La connaissance d’office est une notion du droit de la preuve en common law ("judicial notice" ou "judicial cognizance") qui signifie que le juge (ce peut être un jury aussi), dans le déroulement du procès ou de la rédaction de sa décision, admet des faits de tout genre sans qu’il soit nécessaire d’en prouver l’existence, la nature ou la signification parce qu’ils sont à ce point connus ou notoires que personne ne peut prétendre les ignorer. « Les juges ont-ils le devoir ou tout simplement le pouvoir discrétionnaire de connaître d’office certains faits? » (et non [de] certains faits) « Les jurés ont décidé de connaître d’office les faits relatés dans les mémoires des avocats plaidants. » (et non [des] faits)

  5. Le sujet du verbe connaître de sera donc exclusivement des tribunaux, des juridictions, des juges, des autorités judiciaires, des assemblées délibératives. Tel tribunal connaît de tel type de causes, telle cour d’appel ne connaîtra que des affaires portées en appel ou dont appel, la Cour de cassation ne connaît que des pourvois en cassation, les juridictions supérieures ne peuvent connaître que des décisions de tribunaux inférieurs. « Le Tribunal connaît des affaires dont il est saisi dans l’ordre selon lequel leur instruction est terminée. » « Cette juridiction connaît des jugements prononcés par le collège correctionnel. » « Le Tribunal connaît des requêtes introduites en appel d’une décision rendue par le Tribunal du contentieux administratif. » « Ces juges connaissent des actions civiles uniquement. » « La Cour connaît des violations graves au droit international humanitaire. » « Le tribunal de grande instance connaît de toutes les demandes incidentes qui ne relèvent pas de la compétence exclusive d’une autre juridiction. »
  6. Le complément du verbe connaître de se rapporte généralement à tout ce qui se rattache à l’activité judiciaire et aux notions de procédure. Connaître d’une action, d’un acte, d’un appel, d’un crime, d’un délit, d’une décision, d’une demande, d’une requête, d’une contestation, d’un recours, d’une réclamation, d’une revendication, d’un jugement, d’un différend, d’une question, d’un moyen d’appel ou de défense, d’un critère, d’une poursuite, d’une prétention, d’un renvoi, de la constitutionnalité ou de la régularité d’un arrêt, d’une norme, du droit, des faits. « La Cour suprême connaît des recours exercés contre les arrêts de la Cour d’appel, mais elle ne juge qu’en droit et ne connaît pas des faits. »
  7. Connaître d’un litige signifie instruire, juger la contestation objet du différend. Cette connaissance se fonde aussi bien sur la compétence attribuée au tribunal désigné pour en connaître que sur sa saisine, sa mission de dire le droit et sa vocation à statuer en l’espèce.

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