payer / prélever

  1. Au sens financier, le verbe payer s’emploie avec la préposition sur pour indiquer l’origine d’un paiement ou d’un prélèvement de fonds, plus précisément pour signifier que le paiement se fait sur un compte en particulier. Cette construction s’explique par le fait que, dans cette acception, payer se prend au sens de prélever. Ainsi, de même prélève-t-on une somme sur un compte pour régler une dette, comme on tire un chèque sur un compte, de même paie-t-on ses créanciers sur le produit d’une vente ou sur sa réalisation. Taxes à payer sur les honoraires d’avocat et sur les débours. Montant du revenu net à prélever sur le salaire du demandeur.
  2. Il faut éviter la faute d’usage qui consiste à considérer la locution adverbiale à même comme synonyme de la préposition sur accompagnant les verbes payer et prélever. On dit payer, prélever sur les fonds du Trésor plutôt que [à même] les fonds du Trésor. À même signifie directement en contact avec et ne s’emploie qu’avec un terme désignant un objet concret ou matériel : boire à même la cruche, coucher à même le sol. « J’autorise l’entreprise à prélever les honoraires à même ce compte. » (= sur ce compte).
  3. En outre, le complément marquant l’origine du paiement ou du prélèvement ne peut être introduit par la préposition de, calque de "to pay from". Le juge, par exemple, ne peut rendre une ordonnance de saisie-arrêt provisoire obligeant une partie à payer ou à prélever une somme [du] compte d’une personne, mais sur le compte de celle-ci. Prélever des fonds [de] (= sur) sa ligne, sa marge de crédit.
  4. La tournure payer une personne pour un service, pour un travail, est correcte puisqu’elle signifie la payer pour faire le travail, pour qu’elle fournisse le service. Toutefois, est incorrect en ce qu’il constitue un anglicisme de construction ("to pay for") le tour consistant, par l’emploi de la préposition pour, à faire du complément direct de payer un complément indirect. Par exemple, l’avocat ne demandera pas au témoin combien il a payé [pour] la maison qu’il a achetée, mais, plutôt, combien il a payé la maison pour l’acheter, combien elle a coûté. On paie quelque chose pour l’acheter. « Le demandeur a affirmé avoir payé la maison 200 000 $ », et non avoir payé 200 000 $ [pour] la maison.

    Attention ! Au figuré, le verbe payer pris au sens de dédommager ou de récompenser s’emploie correctement avec un complément de cause introduit par la préposition de (payer quelqu’un de ses services, de sa peine, de ses efforts), cette construction étant plus courante, convient-il de préciser, lorsqu’on la transforme au passif : être payé de sa peine, de sa perte, de ses exploits, de sa constance, de sa diligence, de son mérite.

  5. Pour la conjugaison, le y de payer se change en i devant le e muet : je paie. L’orthographe en y, bien qu’admise, disparaît peu à peu, mais persiste manifestement dans la langue du droit, même si elle tend à être supplantée par la première. De même en est-il pour le substantif : paiement supplante payement, qui sort de l’usage. Dans cette dernière forme, il faut prononcer l’y du verbe et du substantif.

    À l’indicatif présent, on écrit payons, payez, et au subjonctif présent ou à l’imparfait de l’indicatif, payions, payiez. La différence doit se faire sentir dans la prononciation.

  6. Contrairement à sa signification dans la langue usuelle où, concrètement, payer a pour objet une somme d’argent, ce verbe a un sens technique en droit. Le paiement se fait (en) comptant, en espèces, en numéraire, en argent, mais il peut aussi s’effectuer en nature notamment. Les engagements ne sont pas que pécuniaires. L’action de payer suppose nécessairement le fait d’avoir contracté une dette, laquelle, elle non plus ne s’entend pas uniquement d’une dette d’argent. Aussi payer signifie-t-il, à l’égard des obligations contractées, l’action de les acquitter, de les exécuter. Son complément s’étend à toute forme de prestation, en argent, en nature, en activité telle la fourniture, la livraison ou la réalisation d’une chose. Payer une contrepartie non financière, morale, matérielle. Payer en nature, en objets, en productions. « La dation en paiement permet au débiteur de satisfaire le créancier en payant en nature ce qui était dû en argent. » « Au lieu de vous payer un salaire en espèces, je vous le paierai en bétail et en grain. »
  7. Au figuré, payer (pour) une faute, un crime, un attentat, une infraction signifie être puni, expier, subir les conséquences, soit, dans les cas graves, par une peine d’emprisonnement ou de détention, soit, dans les cas jugés moins graves, par la prestation de services au sein de la communauté. En ce sens, le verbe payer a un emploi intransitif ou absolu. « Les criminels doivent payer pour leurs crimes. » « Quoique irresponsables dans l’exercice de leur charge, les juges doivent payer pour leurs fautes privées. » « S’ils sont déclarés coupables, ils paieront. » Commandement de payer.

Avis de droit d’auteur pour le Juridictionnaire

© Centre de traduction et de terminologie juridiques (CTTJ), Faculté de droit, Université de Moncton
Un outil mis en ligne par le Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada

Rechercher par thèmes connexes

Vous voulez en apprendre davantage sur un thème abordé dans cette page? Cliquez sur un lien ci-dessous pour voir toutes les pages du Portail linguistique du Canada portant sur le thème choisi. Les résultats de recherche s’afficheront dans le Navigateur linguistique.

Liens connexes