Du métier dans le corps, de la passion dans l’âme

Paul Leroux
(L’Actualité langagière, volume 5, numéro 1, 2008, page 16)

Dans le feu de l’action, accaparés que nous sommes par notre charge de travail et préoccupés par le besoin de respecter des délais souvent très serrés, nous avons tendance à perdre parfois de vue le pourquoi, le sens profond, de cette profession qu’est la traduction. Il est salutaire de prendre du recul, de temps à autre, pour nous sortir du train-train quotidien et réfléchir à ce qui fait que notre métier est plus qu’un simple boulot.

Quels sont, par exemple, les motifs qui nous ont incités à choisir notre carrière? Quelles sont les caractéristiques qui font en sorte que nous sommes devenus traducteurs? Car il est certain que personne ne naît traducteur. On demande souvent aux enfants : « Que feras-tu quand tu seras grand? » Jamais il ne leur vient à l’esprit qu’ils pourraient faire de la traduction. Nos parents et nos proches ne nous ont jamais proposé de suivre cette voie d’avenir. Alors comment sommes-nous parvenus à ce choix?

Nos antécédents y sont certes pour quelque chose : notre famille, notre milieu social, politique et historique, nos lectures, nos études, nos voyages, notre expérience de la vie. Nés au Canada, nous nous trouvons au confluent de deux cultures. Nous sommes sensibilisés, bien plus que le commun des mortels, aux différences entre les langues et les manières de penser, ainsi qu’à l’importance de combler le fossé entre celles-ci.

À un niveau plus personnel, nous sommes peut-être issus de familles qui privilégiaient l’étude, la lecture, la culture, ce qui nous a davantage poussés à cultiver notre langue, à apprécier sa beauté, à favoriser son rayonnement. Finalement, les traits de base de notre personnalité elle-même expliquent peut-être le métier que nous avons choisi, surtout une curiosité, un intérêt, un engouement pour le monde qui nous entoure et pour les mots qui expriment cette réalité fascinante.

Nous sommes aussi dotés de créativité et d’imagination, dons qui ne sont pas la chasse gardée des romanciers, des dramaturges et des poètes. Nous sommes plus sensibles que la plupart des gens à l’euphonie, au rythme et à la musicalité de la parole. Dans l’expression orale et écrite, nous avons le souci de la clarté, de la simplicité et de la limpidité. Nous croyons, comme Alphonse Daudet, que la nôtre est « la plus belle langue du monde, la plus claire, la plus solide ». Il y a fort à parier que certains d’entre nous sommes des écrivains en herbe, des auteurs en puissance.

Nous avons peut-être approfondi certains domaines, mais nous avons en même temps plusieurs cordes à notre arc. Nous maîtrisons, bien sûr, ces outils abstraits et impalpables que sont la grammaire, le vocabulaire, la ponctuation, voire la rhétorique. Mais nous savons aussi utiliser à bon escient les outils plus concrets et techniques de notre métier : les équipements, les logiciels, les moteurs de recherche, la Toile…

Enfin, nous avons de l’entregent et l’esprit d’équipe, deux qualités qui nous permettent de collaborer avec nos collègues et nos coéquipiers afin de bien servir notre clientèle. Nous aimons passionnément notre métier, sans pour autant en faire un sacerdoce.

Somme toute, nous savons que la traduction, c’est bien plus qu’un simple boulot. C’est une profession, voire un art. Nous avons du métier dans le corps. Mais, longtemps avant de devenir traducteurs, nous avions déjà la passion dans l’âme.

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