L’immersion française, moteur de la dualité linguistique en Colombie-Britannique

Publié le 6 janvier 2020

J’ai grandi dans une famille anglophone de la banlieue de Vancouver. Pendant mon enfance, les gens demandaient souvent à mes parents pourquoi ils avaient inscrit leurs trois enfants à un programme d’immersion française. Combien de fois ai-je entendu des commentaires tels que « personne ne parle français ici », « nous sommes si loin du Québec » ou « il y a certainement des langues plus utiles à apprendre »!

Mais comme le disait Jade Turcot-Plante dans son billet paru dans ce blogue, la communauté francophone de Colombie-Britannique ne fait pas qu’exister : elle prospère. Ma province compte plus de 70 000 francophones, et pas moins de 300 000 personnes y parlent le français en plus d’une autre langue. La dualité linguistique de la Colombie-Britannique a de multiples sources, dont la francophonie canadienne et l’immigration des quatre coins du monde francophone.

Depuis quelques dizaines d’années, la vitalité et la diversité de la communauté francophone profitent d’un nouvel allié : le programme d’immersion française de la province, qui jouit d’un succès et d’une popularité inégalés.

Apprendre les deux langues ensemble

Le programme d’immersion française est une création canadienne qui donne aux élèves non francophones la chance de travailler les deux langues officielles du Canada jusqu’au niveau du bilinguisme fonctionnel. Les élèves peuvent commencer le programme dès l’école maternelle (immersion précoce) ou à partir de la 6e année (immersion tardive). Ils seront bilingues à la fin de leur programme, en 12e année.

Dans les programmes d’immersion, la majorité des matières habituelles sont enseignées en français. La langue française est donc bien plus qu’une matière comme les autres. Elle devient une méthode d’instruction et, de façon plus générale, un mode de communication. Les élèves n’apprennent pas simplement le français : ils apprennent en français. En plus d’acquérir des compétences en langue française, les élèves en immersion apprennent à connaître et à valoriser la multitude des cultures qui composent la Francophonie.

Un modèle à suivre

En 2019, la Colombie-Britannique a célébré les 50 ans de l’immersion française dans la province. Malgré des débuts modestes, le programme a connu un essor remarquable en un demi-siècle. Aujourd’hui, les parents sont plus nombreux que jamais à vouloir offrir l’immersion française à leurs enfants. Au niveau provincial, le nombre d’inscriptions au programme d’immersion française s’accroît année après année depuis 21 ans, même si le nombre total d’inscriptions à l’école a diminué. En 2018-2019, 54 000 élèves étaient inscrits au programme, soit 9,5 % de la population étudiante.

Au fil du temps, les finissants de ce programme ont récolté les fruits de leurs efforts. Aujourd’hui, nombre d’entre eux vivent et travaillent dans les deux langues officielles, dans leur localité d’origine et ailleurs; d’autres se servent simplement de leur deuxième langue quand ils voyagent. Certains sont devenus eux-mêmes professeurs d’immersion française. Beaucoup ont choisi d’inscrire eux aussi leurs enfants au programme d’immersion.

Le programme d’immersion française a donc donné une belle impulsion à la dualité linguistique en Colombie-Britannique. Les Britanno-Colombiens reconnaissent les avantages cognitifs, sociaux et culturels des programmes d’instruction en langue seconde, et ce, en dépit du faible pourcentage de francophones dans la province et de la distance qui la sépare du Québec.

Le revers de la médaille

Hélas, la popularité croissante de l’immersion française n’est pas sans inconvénient. Bien des districts scolaires, à court de locaux, ont du mal à offrir les deux programmes (instruction en anglais et immersion française). Qui plus est, la Colombie-Britannique, tout comme les autres provinces à majorité anglophone, a besoin de plus de professeurs qualifiés pour répondre à la demande. Ces obstacles touchent tous les districts scolaires, des centres urbains les plus peuplés aux petites localités rurales des quatre coins de la province.

Si l’on pouvait résoudre ce problème d’accès au programme, ce sont potentiellement des milliers d’élèves qui profiteraient des avantages qu’offre une connaissance pratique des deux langues officielles. Nos communautés francophones y gagneraient aussi de futurs membres qui les enrichiraient de leurs expériences d’apprentissage et de leurs parcours variés, ce qui profiterait aussi au Canada dans son ensemble.

Un programme tourné vers l’avenir

Si la popularité du programme a apporté son lot croissant de défis, la bonne nouvelle, c’est que les partisans du programme travaillent activement à proposer des solutions. Des parents ont adressé leurs préoccupations aux districts scolaires et aux administrations locales. Des organismes sans but lucratif et des groupes locaux se sont ralliés à la cause des professeurs et des familles et se sont mis à offrir des occasions d’apprentissage parascolaires. Les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral ont annoncé un financement accru et de nouvelles avenues pour la formation de professeurs d’immersion française dans l’Ouest canadien. Ils cherchent également à recruter des enseignants qualifiés dans les provinces de l’Est et d’autres pays.

Les progrès sont évidents et les inscriptions augmentent d’année en année. Le grand public et la classe politique sont déterminés à trouver des solutions pratiques pour lever les obstacles. L’avenir du programme d’immersion française de la Colombie-Britannique – tout comme celui de la dualité linguistique de la province – s’annonce prometteur.

Voir la source consultée
  • Canadian Parents for French – British Columbia & Yukon, Enrolment Statistics, Vancouver, 2019 (en anglais)

Traduit par Marc-André Descôteaux, Portail linguistique du Canada

Avertissement

Les opinions exprimées dans les billets et dans les commentaires publiés sur le blogue Nos langues sont celles des personnes qui les ont rédigés. Elles ne reflètent pas nécessairement celles du Portail linguistique du Canada.

En savoir plus sur Alex Hughes

Alex Hughes

Alex vient de la banlieue de Vancouver. Ayant fait partie d’un programme d’immersion précoce en français, elle est passionnée par les langues officielles depuis son tout jeune âge. Elle détient des diplômes en français et en politiques publiques de l’Université Simon Fraser et de Sciences Po (Paris). Elle possède également un baccalauréat en droit civil et un baccalauréat en droit de l’Université McGill. Aujourd’hui, elle est avocate plaidante en droit des Autochtones au ministère de la Justice. Dans ses temps libres, elle fait du bénévolat auprès de la communauté francophone et francophile de la Colombie-Britannique.
 

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